mercredi 9 novembre 2011

Un trou dans la moustiquaire (début)

J'ai appris très jeune à ne pas exprimer ouvertement ma colère, ayant compris que cela pouvait entraîner des conséquences terribles. Ma mère a disparu à la suite d'une de ses très spectaculaires colères. On nous a dit qu'elle ne reviendrait plus, car elle était morte. Parce que j'étais une petite fille, les conséquences étaient un peu moins terribles - le seul endroit où l'on me faisait disparaître, c'était dans ma chambre.

La fenêtre de ma chambre était appuyée sur la cheminée, ce qui assurait une présence constante d'araignées, été comme hiver. Mon père avait la lourde tâche d'apaiser mes cris hystériques en écrasant ces pauvres créatures. La plupart étaient des épeires diadèmes (Araneus diadematus), également connues sous le nom d'araignées à gros cul et à pattes griffues. Elles ne cessaient jamais de croître, atteignant souvent une taille démesurée. Ma fenêtre ne donnait sur nulle part - enfin, ce n'est pas tout à fait juste - disons plutôt que le mur de briques de la maison de notre voisin et les solins de toit endommagés n'avaient rien d'inspirant. J'étais souvent confinée à ma chambre pour cause d'insoumission, d'effronterie ou de désobéissance (aux dires des marâtres qui nous surveillaient mes trois frères et moi jusqu'au retour de mon père). Mon désir de liberté  s'alimentait à l'auge de toutes les nuances de la honte et de la rage.

Pendant longtemps, ma chambre a eu des murs "roses" - enfin, pas tout à fait. Si je travaillais pour une grande entreprise de peinture murale, je pourrais donner des noms poétiques à la teinte des murs de ma chambre:
  • "mesclun de restes de peinture allongés de carmin" (c'est un peu long)
  • "diachylon pimpant"
  • "coulis de chair"
 à suivre...

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